Philosophies européennes et théories de l’art américain : la revue October.

La thèse porte sur une constellation de critiques d'art contemporains identifiable à partir de leur commune participation à la revue "October" (1976-aujourd'hui). Elle aborde l'ensemble de leurs textes jusqu'en 2004. Comment ces auteurs peuvent-ils penser leur entreprise comme "critique" dans un contexte qu'ils considèrent eux-mêmes comme celui d'une colonisation complète de la vie culturelle par la marchandisation? Partant de l'hypothèse que c'est l'histoire qui leur permet de produire des conditions de possibilités d'un discours critique, ce travail s'attache à identifier les "régimes d'historicité" (Hartog, 2003) qu'ils instaurent pour penser l'art selon un formalisme moins morphologique que "procédural" (Spaulding, 2023). Nous nous interrogeons sur les enjeux portés implicitement dans la relecture et la traduction américaine de matrices conceptuelles ouest et est-européennes, qu'elles proviennent de la production artistique (constructivisme, dadaïsme, surréalisme) ou philosophique (Nietzsche, Benjamin, Adorno, Kracauer, Husserl, Merleau-Ponty, Lévi-Strauss, Barthes, Foucault, Baudrillard). Sont mis au jour les dispositifs des "poétiques de l'histoire" (White, 1973) construits par la revue : obsolescence, tardiveté, rétrospective, montage, contre-factualité, revitalisation historique, feuilletage des temps sont les opérations clefs de la revue se mettant en scène comme un dispositif autorisant une mise à distance de son propre moment historique. L'ancrage méthodologique principal de la thèse est philosophique. Elle emploie ponctuellement les apports méthodologiques d'autres disciplines - histoire de l'art, historiographie, histoire intellectuelle en particulier.